Le site de généalogie de Catherine et Michel Meste |
Mon ancêtre Julio Felipe Mauricio DELOUSTAL (Sosa 12), né à Santiago de
Cuba le 28.5.1848, élevé à Barcelone puis marié à Marseille le
2.8.1870, a vécu ensuite 16 ans à Tunis, puis 30 ans à Hanoï (Tonkin)
de 1886 jusqu’à son décès le 9.10.1916. J’ai retracé les évènements
majeurs de son existence dans notre livre.
J’ai aussi retrouvé son ascendance paternelle dans le Quercorb jusqu’en 1670, près du château cathare de Puivert (Aude). Il me reste la partie la plus mystérieuse : Cuba. Pourquoi et comment son père Louis DELOUSTAL (Sosa 24), paysan du sud de la France, est-il parti pour cette ile espagnole ? et, ce qui m’importe ici, qui est Louise DEROUVILLE, sa mère ? Concernant les raisons du départ de Louis Deloustal pour Cuba, je n’ai encore trouvé aucun document justificatif. |
Louis DELOUSTAL embarque le 2.1.1839
à Bordeaux pour Santiago de Cuba ; son passeport le décrit ainsi :
22 ans, né à Carcassonne, 1,60m, visage
ovale, menton rond, yeux châtains, cheveux noirs, nez pointu,
profession
tailleur d’habits.
La
mère de Louis, Anne CONSTANS, embarque à son tour à Bordeaux pour Cuba
le
25.2.1841 : 54 ans, née à Pieusse dans
l’Aude,1,50m, visage ovale, menton rond, yeux châtains, cheveux
châtains, nez
relevé, profession marchande (plus tard Anne CONSTANS suivra
encore son
fils de Cuba à Barcelone).
Moins
d’un an après son arrivée à Santiago de Cuba, Louis DELOUSTAL épouse
dans la
cathédrale San Tomas le 4.11.1839, Louise DEROUVILLE, âgée de 19 ans,
fille de
Carlos DEROUVILLE et de Maria-Luisa BOUNOMME. C’est dans l’acte de
naissance
presque 10 ans après, de leur fils Julio (appelé en France Jules
Philippe
Maurice), que nous apprenons que les grands parents sont de
Gonaïves.
Ainsi,
ce n’est pas à Cuba, en terre espagnole, qu’il faut chercher
l’ascendance
maternelle de Jules (Julio), mais à Saint- Domingue, colonie française
jusqu’à
la Révolution de 1789.
Alain Yacou écrit en 1987 : « Cette
présence des colons français ou de leurs descendants à Santiago de Cuba
au
lendemain de la Révolution à Saint-Domingue a fait l’objet de
nombreuses
études. C’est là où ils étaient les plus nombreux, c’est là où les
traces sont
encore bien visibles et là où l’apport français a été cultivé et pour
ainsi
dire vivifié tout au long du XIXème siècle. » Reprenant Eugène
Aubin 1910
il écrit : « Cuba étant l’île la plus proche, les
français se
répandirent dans toute la partie occidentale alors à peu près
déserte ;
ces colons nombreux se groupèrent au pied de la Sierra Maestra et de la
région
montagneuse qui borde la côte, depuis Santiago de Cuba jusqu’au-delà de
Guantanamo. »
Au total, près de 7 000 Blancs de Saint-Domingue ont fui à Cuba
jusqu’en
1798.
L'historien français Gabriel Debien
fut le premier à signaler l'activité corsaire des réfugiés de
Saint-Domingue à Santiago
de Cuba, où
le gouverneur Juan
Bautista Vaillant Berthier,
arrivé en 1799, veut développer la partie orientale de l'île, les
terres étant
trois fois moins chères que dans la partie ouest. Les Français de
Saint-Domingue importent leur technologie à Cuba,
où la production sucrière est encore sous-développée, contribuant à la
faire
tripler, de 14,3 millions de tonnes en 1790 à 41,7 millions en 1815. Ils ont amené des esclaves mais en
rachètent, précipitamment, anticipant l'abolition de la traite
négrière en
1808. Entre
1792 et 1807, Cuba a importé autant d'esclaves
qu'en deux siècles.
Le
11 avril 1809, les autorités espagnoles à Cuba
expulsent les Français, en particulier les pirates et négriers
français, car
l'Espagne a aboli l'esclavage. Entre le 10 mai 1809 et le 17 août 1809,
pas
moins de 55 bateaux, appartenant pour la plupart à des pirates
français,
quittent Cuba pour se rendre à La
Nouvelle-Orléans,
chargés de réfugiés français de Saint-Domingue. Sur ces 55 bateaux, 48
viennent
de Santiago
de Cuba, dans
la partie
orientale de l'île, la plus dense en peuplement français. Mes
DEROUVILLE sont restés à Cuba.
Par
internet, nous
avons trouvé Sylvita DEROUVILLE qui vit (aujourd’hui 2018) à Santiago
de Cuba :
« ma cousine présumée » fait partie d’un groupe de chanteuses
noires,
les « Vocal Divas », qui chantent a
capella. Nous sommes allés les écouter d’abord près de Bordeaux,
puis près
de Toulouse, et avons fait leur connaissance.
Ma « cousine » (qui porte le nom de sa mère) n’a pas fait les
recherches
que j’espérais aux archives de la cathédrale de Santiago. Je recherche
toujours
aujourd’hui les traces des DEROUVILLE à Cuba très difficilement
Par contre j’ai pu rechercher aux archives
d’Aix-en-Provence (ANOM) les DEROUVILLE de St Domingue d’avant la
Révolution
Française.
1-La
carte de Saint-Domingue de
1760 (ANOM) montre près de Gonaïves les territoires portant les noms
des
propriétaires : MELIN, ROUANNAIS, DERONVILLE, MARCHAND,
TROPEE,
BRUNET…, tous « habitants », près de la Rivière La Brande.
2-Sur
les cartes actuelles d’Haïti
on trouve le lieu : DERONVILLE.
3-Les
actes notariés
antérieurs à la Révolution, écrits à la main, ne permettent pas de
trancher : DEROUVILLE ou
DERONVILLE ? Les registres
paroissiaux non plus. Même ambiguïté au niveau des signatures.
4-Moreau
de Saint-Mery cite Pierre
DEROUVILLE époux de Catherine
MESLIN.
5-Le
site Domingino (internet) répertorie quelques DERONVILLE
et cite : Jean-Jacques DERONVILLE créole de
Saint-Domingue, époux de Marie Catherine DERONVILLE ; Marie
Françoise
DERONVILLE épouse Chasset, créole de Saint-Domingue ; Laurent
DERONVILLE (sans
doute le fils de Louis DERONVILLE et Elisabeth ESCOT). Je les ai
retrouvés dans
les registres paroissiaux et les énumérerai plus loin.
Ayant interrogé
l’auteur du site, il nous a également nommé
les héritiers de Marie Angélique DEROUVILLE (épouse GRENOT) pour
une
sucrerie à Maribarou : Pierre Ambroise Isidore GRENOT, Marie Anne
GRENOT,
Sophie GRENOT et Rose Elisabeth GRENOT veuve LAPICE. Les
LAPICE, émigrés à La Nouvelle-Orléans, y
fondèrent la première grande sucrerie de Louisiane.
Dans
ce qui suit, j’ai fait le choix de la graphie DERONVILLE sans
différencier
DEROUVILLE de DERONVILLE.
Les premiers DERONVILLE se trouvent dans le nord-est de l’île, près du Cap et de la frontière avec la partie espagnole, à Ouanaminthe, Maribarou, Fort-Dauphin ou encore à Terrier-Rouge. Leurs descendants DERONVILLE se déplacent dans l’Ouest de l’île, à Gonaïves.
On
trouve dans les registres paroissiaux des Archives des Territoires
d’Outre-mer
à Aix-en-Provence (ANOM) :
1-
Monsieur
De ROUVILLE en 1714 : il fait
baptiser le fils d’un de ses esclaves à Fort-Dauphin.
On peut évaluer la date de sa naissance à 1690. Il est peut-être le
père de certains
de ceux qui apparaissent ensuite ?
2-
Pierre
DERONVILLE né à Terrier Rouge, qui se
marie avec Catherine MELIN en 1757 à Gonaïves.
Pierre
Gabriel DERONVILLE qui épouse Marguerite STERLIN en 1771, à Petite
Rivière de l’Artibonite, quittant
ainsi la région de Fort-Dauphin. Il décède en 1790 à 66 ans. Il est
donc né en 1724.
Pierre
et Pierre Gabriel sont frères, nés à
Terrier Rouge : c’est sur leurs actes de mariage respectifs que
l’on en
trouve la confirmation. Nés vers
1725, ils sont les enfants de Pierre DERONVILLE, capitaine des
hussards de
la milice des Gonaïves, et Louise DUBOIS. Voici leurs signatures :
Marguerite
STERLIN est la fille naturelle de Louis STERLIN et de Marie MARY. Elle
est la
petite-fille de Jean STERLIN dit la plaine, chirurgien, né à Cadillac
en Gironde,
et de Marguerite CHELEAU-DESFORGES. Elle est la nièce de Nicolas
STERLIN, marié
à Bernarda del Monte Luna, et la cousine de Tiburcio STERLING leur
fils, marié
à Anna-Maria HEREDIA à Santiago de Cuba en 1809. Il s’agit de la
famille du
poète français de Heredia.
3-
Louis
DERONVILLE
né vers 1710, époux de Elisabeth ESCOT :
leurs enfants naissent à Ouanaminthe.
Au décès de Louis en 1777 à Ouanaminthe, on mentionne « mulâtre
libre ». (Leur fille Louise, née en 1740 et morte en 1772 à
Ouanaminthe,
ne peut être la femme de Charles ROUANNAIS (1726-1772), qui marie sa
fille Louise
Catherine à Charles JUCHAULT en 1778 à Gonaïves, voir ci-après.) Dans
les registres
paroissiaux, Louis est appelé DE ROUVILLE.
4-
Jean
DERONVILLE
et Marie Françoise LEPAGE (née en 1725) :
leurs enfants naissent à Ouanaminthe.
En 1777, à la naissance de leur fille Marie Françoise Adélaïde, ils
sont tous
deux désignés « mulâtres libres ».
5-
Jean
DERONVILLE
et Marie Jeanne VINET, nés vers
1720 : leur fils Jean-Jacques, né en 1743 à Ouanaminthe,
se mariera avec sa cousine germaine Marie-Catherine
DERONVILLE en 1783 à Gonaïves (comme
on le verra ci-dessous cf. 8). Jean est donc le frère de Pierre,
l’époux de Marie
Louise Rouannais.
6-
Marie
Angélique DERONVILLE et Jean Charles GRENOT, né à Paris
vers 1716 : leur fils Charles Bernard GRENOT, né en 1757
à Fort Dauphin, épousera en 1787 à Gonaïves
Anne DERONVILLE (que l’on
retrouvera plus loin); Charles Bernard est propriétaire d’une
plantation de
café près de Gonaïves en 1793. Comme mentionné plus haut, ses sœurs
seront
indemnisées en 1831 pour l’héritage d’une sucrerie à Maribarou.
Les LAPICE de la Nouvelle Orléans sont leurs descendants
(cf Domingino, mentionné ci-dessus).
Les signatures ci-dessous au décès du bébé Jean René Grenot sont celles de Jean Jacques DERONVILLE (signature : j. j. Deronville), et de son père (J. De Rouville) à côté de celle de Jeanne DERONVILLE inconnue.
Ci-dessous
la signature de Marie Angélique DERONVILLE épouse GRENOT, et celle de
son époux
au bas de l’acte de baptême de Rose GRENOT.
Jean-Jacques
DERONVILLE est proche de Marie Angélique DERONVILLE : il est présent à Fort Dauphin en 1763 âgé de 20 ans au
baptême de Marie Anne GRENOT, puis en 1773 au décès de Jean René GRENOT
et enfin
en 1778 au décès de Jean Charles GRENOT.
Lors
du mariage à Gonaïves de Charles Bernard GRENOT et de Anne DERONVILLE,
(née à
Terrier Rouge, majeure d’âge, fille de Pierre DERONVILLE et de
Marie-Louise ROUANNAIS),
il est précisé qu’il existe un degré de consanguinité : on peut
considérer
que Marie Angélique, Jean (époux de Jeanne Vinet) et Pierre DERONVILLE
(l’époux
de Marie Louise ROUANNAIS, voir plus loin 8) sont frères et sœur. On
trouve également
sur cet acte la signature : G. DEROUVILLE ; aucun G.
DERONVILLE n’est
cité dans l’acte lui-même : est-ce la signature de Pierre-Gabriel,
frère
de Pierre (époux de Catherine MELIN) ?
7-
Louise
DERONVILLE et Charles ROUANNAIS (né en 1726 à Maribarou dans le nord de l’ile, frère de Catherine et
Marie Louise
ROUANNAIS) : je n’ai trouvé
ni leur acte de mariage ni la naissance
de Louise. Leurs enfants naissent à Gros Morne et à Gonaïves après 1759. Je
montre ci-après que Louise est la fille de Pierre DERONVILLE née avant
le
mariage avec Marie Louise Rouannais.
En
effet :
-
Je trouve à Fort-Dauphin en 1760 l'acte de baptême de Jean Pierre
JOLLY, fils
de Jean Mathieu Jolly et défunte Marie Louise DERONVILLE : le
parrain est
son grand-père Pierre DERONVILLE, la marraine est sa belle-grand-mère
Marie Louise ROUANNAIS.
-Par
ailleurs l'acte notarié du 9.9.1778 pour le mariage à Gonaïves de
Louise
Catherine ROUANNAIS fille de Charles et Louise DERONVILLE précise que
les
enfants de Pierre DERONVILLE et Marie louise ROUANNAIS sont les oncles
et
tantes au paternel des enfants de Louise DERONVILLE et Charles
ROUANNAIS.
Donc
Louise DERONVILLE est la fille d'un
premier mariage de Pierre DERONVILLE ; elle est la sœur de la défunte
Marie
Louise épouse
JOLLY (décès en 1760 et
doit être née vers 1740.
8- Pierre DERONVILLE, dont je n’ai pas trouvé la naissance (au mariage de sa fille Marie Catherine, il est dit « de Terrier-Rouge »), marié à Marie Louise ROUANNAIS (sœur de Charles). Nous avons vu qu’il était le frère de Jean et Marie Angélique, nés vers 1715. Ci-dessous les signatures de Pierre et de sa femme Marie Louise ROUANNAIS avant son veuvage ; elle signe Rouannais Deronville ; une fois veuve elle signera : v.deronville.
Les
premiers enfants naissent à Terrier-Rouge près de Fort-Dauphin : Marie-Jeanne-Pauline, Jean Baptiste
dit Lavenant,
Charles Nicolas dit Brézé, Louis dit Le Trieu,
et Anne Pétronille qui épousera en 1787 à
Gonaïves Charles Bernard GRENOT, de Ouanaminthe, cité plus haut. Elle
signe
« annette ». A ce mariage, on trouve la signature de Pierre
Gabriel DERONVILLE,
frère de Pierre (époux de Catherine MELIN).
Les enfants
suivants naissent à Gros Morne, dont Marie Catherine qui épousera Jean
Jacques DERONVILLE
de Ouanaminthe cité plus haut, son cousin germain, d’où ses
signatures avant et
après
son mariage :
9-
Alexis
DERONVILLE et Marie-Louise BRUNET : ils ont une fille Françoise en
1777 à Ouanaminthe ; ils sont
tous deux mulâtres libres ; l’acte
de baptême est signé par Jean DERONVILLE (père de Jean-Jacques). On retrouve sur les cartes de l’époque
l’habitation
des héritiers BRUNET près de Gonaïves.
10-
D’autre part, à Ouanaminthe,
apparaissent après 1770 plusieurs naissances d’enfants
naturels de Marie-Marguerite, Marthe, Marie-Renée, et Marie-Marthe,
toutes DERONVILLE,
sans que l’on puisse les rattacher aux 9 groupes précédents.
Parmi
toutes ces naissances d’enfants
légitimes ou naturels, on ne trouve aucun enfant se prénommant Carlos
ou
Charles.
a)
J’ai
pu établir que Louise DERONVILLE/DEROUVILLE est la fille de Pierre
(époux de Marie
Louise ROUANNAIS) : elle est donc la
demi-sœur de Marie Catherine Geneviève et d’Anne DERONVILLE. Jean
Jacques est donc
le cousin germain de sa femme Marie Catherine, d’Anne et aussi celui de
Louise
épouse de Charles Rouannais.
b)
J’ai
pu établir que Charles, Marie Louise et Catherine ROUANNAIS sont frère
et sœurs :
·
Le
20.4.1736, naissance à Gonaïves de
Jean-Baptiste ROUANNAIS fils de
Charles et Anne MARCHAND, la marraine est sa sœur Catherine dont je
n’ai pas
trouvé la naissance ; lorsque Catherine ROUANNAIS se marie le 5.10.1740
à Gros
Morne, son père Charles est présent.
·
le
13.2.1740 naissance de Jean Nicolas
ROUANNAIS fils de Charles et Anne MARCHAND à Gros Morne, la marraine
est sa
sœur Marie-Louise ; lorsque Marie Louise ROUANNAIS se marie le
29.4.1742 à
Gros Morne, sa mère Anne MARCHAND est présente, son père vient de
mourir ;
lorsque Marie Louise ROUANNAIS se remarie le 23.2.1754 à Gros Morne, avec Pierre DERONVILLE son frère Charles
ROUANNAIS est présent.
·
le
22.1.1771, naissance de Marie Louise ROUANNAIS fille de Charles
(1726)
et de Louise DERONVILLE : la marraine est sa tante Marie Louise
ROUANNAIS
veuve DERONVILLE ; je n’ai pas pu trouver le mariage de Charles
ROUANNAIS
et de Louise DERONVILLE ; le premier enfant que je leur ai trouvé
est Pierre Charles, né le 18.1.1759 à Gros
Morne ; le parrain est Pierre DERONVILLE (sans doute le
grand-père, époux
de Marie Louise ROUANNAIS), représenté par Louis de Labarthe (frère du
premier
mari de Marie Louise ROUANNAIS), et la marraine Anne MARCHAND veuve
ROUANNAIS, quarteronne.
c)
Je n’ai pas pu établir
les liens entre :
-
les frères et sœur DERONVILLE : Pierre
(époux de Marie Louise ROUANNAIS), Jean
(époux de Jeanne Vinet/Vinette) et Marie
Angélique (épouse Grenot) dont le fils épouse
Anne Deronville fille de Pierre.
- et les descendants de Pierre DERONVILLE
et Marie MONIER :
Pierre (époux
de Catherine Melin) et Pierre
Gabriel (époux de Marguerite Sterlin). Les
deux familles se retrouvent parrain et marraine ou témoin de mariage,
mais il
n’est pas question de lien de parenté dans les actes.
Par
contre ils sont tous alliés aux Rouannais
de Gros Morne et Gonaïves, et nés dans la province du Nord.
d)
En
outre :
Les
registres comportent de
nombreuses lacunes. De nombreuses archives ont disparu à la Révolution.
On
ne trouve aucun DERONVILLE
dans la partie sud de l’île, ni même à Port-au-Prince ou Léogane dans
le sud de
la partie Ouest.
Les
filles se marient très
jeunes pour la plupart (14 à 21 ans), à des hommes plus âgés qu’elles
de 10 à
20 ans.
Les
mariages se font entre les
descendants d’anciens de Saint Domingue, nés peu avant 1700 :
Pierre
DERONVILLE et Louise DUBOIS ; Charles ROUANNAIS et Anne
MARCHAND ;
Pierre MELIN et Marie MONIER ; Jacques JUCHAULT et Marie BOISSEL.
1-Carlos
(père de Louise DERONVILLE épouse de Louis DELOUSTAL, mes ancêtres)
porte un
prénom qui est surtout fréquent dans la famille ROUANNAIS.
2-
On sait que de nombreux
colons de Saint-Domingue ont fui l’île à la Révolution pour devenir
planteurs
de café à Santiago de Cuba. Lors du mariage à Santiago de Cuba de
Louise DEROUVILLE
/DERONVILLE et de Louis DELOUSTAL, il est précisé que les parents sont
de
Gonaïves : donc ils y sont nés, avant 1790.
3-Quels
sont les DERONVILLE
de la région de Gonaïves en âge de donner un fils, soit nés vers
1760-70 ?
On peut penser :
-
aux enfants
de Marie-Catherine DERONVILLE et de Jean-Jacques DERONVILLE
(petits-enfants de
Marie Louise ROUANNAIS et Pierre DERONVILLE).
-
aux
enfants DERONVILLE : Louis (dit le Trieu) et de Charles Nicolas
(dit Brézé),
aussi petits-enfants de Marie Louise ROUANNAIS et Pierre DERONVILLE.
-
aux enfants
de Pierre-Gabriel DERONVILLE décédé en 1790, époux de Marguerite
STERLIN. Au
mariage de Louise DERONVILLE (Sosa 25) en 1839, est témoin Francisca
ESTENLIN.
Ce pourrait être Francisca STERLING del Monte, petite fille de Jean
STERLIN dit
la plaine, et fille de Maria de HEREDIA et de Tiburcio STERLING, cousin
de
Marguerite STERLIN.
- aux enfants de Pierre Guillaume DERONVILLE et de Pierre DERONVILLE, eux-mêmes enfants de Catherine MELIN et Pierre DERONVILLE.
Je
n’ai malheureusement trouvé
aucune naissance d’un Carlos/Charles DERONVILLE parmi les actes de
naissance de
Saint-Domingue à Aix-en-Provence.
Il faudra explorer les archives de Cuba : Charles DERONVILLE doit y être arrivé jeune homme avec ses parents et s’y être marié.
J’ai trouvé à Saint-Malo vers 1700 de nombreux : BONHOMME/BOUNOMME, STERLIN/STERLING, et même quelques ROUANNAIS-ROUENNEZ ! De nombreux Acadiens ont rejoint Saint-Domingue ; ils ont des liens privilégiés avec Saint-Malo : on peut penser aux de ROUVILLE du Canada.
Venus de France Jean Charles
GRENOT, né à Paris (paroisse st Roch) et sa femme
Marie Angélique DERONVILLE venue de Ronville
(Nord-Pas-de-Calais) d’après Domingino. Les frères de Marie Angélique,
Pierre
et Jean viendraient donc de France eux-aussi.
J’ai retrouvé l’origine du premier mari de
Marie-Louise ROUANNAIS :
Louis de la BARTHE, fils d’écuyer Jean, sieur de l’Isle et de Françoise
LARMANDIE
du LONGA, mariés en 1704 au château de Campaigne en Dordogne.
Louis de la BARTHE est venu à Saint Domingue avec ses
deux frères : autre Louis et Félix. Le quatrième frère, Marc,
épousa à
Paris Marie Magdeleine BART, fille du célèbre corsaire Jean BART.
Capesterre en Guadeloupe : On
trouve dans cette ville Richard/Charles Rouannay, chirurgien (né à
Saint-Christophe de Jean Rouannay et Jeanne Lesné) qui épouse en 1684
Marie/Marguerite
Bourgeois, peut-être mulâtre, fille de Jean Bourgeois et Marguerite
Sauvage.
Richard est quelquefois appelé Charles, et Marie quelquefois
Marguerite, et une
fois très peu lisible semble-t-il : muleide.
J’ai
trouvé les naissances de
6 enfants de 1690 à 1702 pour Richard et Marie ; deux autres Rouannay,
présentés comme fils
et fille de Richard seraient peut-être
nés à Saint Christophe (Elisabeth inhumée en 1719 sans la présence
de
Richard et Jean qui épouse Marie Godefroy en 1713). Marie Bourgeois
décède en
1704.
Je
ne retrouve ensuite en
Guadeloupe que Joseph Rouanès, métis libre fils de Jean qui épouse
Agathe
carteronne fille de Ursule métisse ; ils ont une fille Pauline née
en
avril baptisée en juin 1775. Agathe décède en novembre 1779 à 28 ans.
Hypothèse :
Richard/Charles Rouannay
(né vers 1664 à Saint-Christophe) pourrait-il
avoir un lien avec l’habitant du Gros Morne à Saint Domingue , dont les
enfants
naissent près de Fort-Dauphin entre 1720 et 1739, et qui décède
en 1742 ?
Saint-Christophe, « berceau
de la colonisation des Antilles par la France, l’Angleterre et les Pays
Bas »
dans Wikipedia.
En
1625, des protestants
français et anglais se partagent l’île sous la gouvernance des
Anglais :
un traité de partition est à l’origine d’une occupation pacifique de
l’île.
Mais les Hollandais, installés dans l’île voisine de saint Eustache,
viennent
brouiller les pistes.
Le
flibustier Pierre
Belain d’Esnambuc obtient de Richelieu la création de la Compagnie de
Saint
Christophe. Mais les Espagnols dispersent les occupant de Saint
Christophe en
1629, qui à leur tour chassent les espagnols de l’île de
la Tortue qui devient leur base, le lieu de tous les
échanges de la flibuste.
(Le
mot
flibustier apparaît en français pour la première fois dans les années
1630 sous
la forme « fribustier », du contact des aventuriers français
avec les
corsaires hollandais et zélandais, en néerlandais les « vrijbuiter » :
« libre faiseur de butin ». On estime qu'il y aura jusqu'à
1 500 flibustiers actifs, définis en 1677
par Monsieur de Pouancey qui était l'un d'eux. Wikipedia)
La côte Nord de Saint Domingue,
désertée
par les espagnols (qui se concentrent dans la partie est d’Haïti) est
peuplée
de bétail devenu sauvage ; les boucaniers s’en emparent
pour vendre
de la viande séchée élément important de l’alimentation des nombreux
navires.
En
1665, un ancien boucanier Bertrand d’Ogeron est nommé gouverneur ‘de l’Isle de la Tortue et Coste Saint
Domingue’.
« Au
terme d'un XVIIe siècle de
sang et de feu, la Tortue
s'assagit. Les centres de la flibuste se déplacent pour laisser la
place au
développement de l'économie de Saint Domingue, qui deviendra le « grenier
à sucre »
de l'Europe. Ses exportations dépasseront en valeur celle de l'Amérique
proche ».
Wikipedia
Le peuplement est
assuré par le transport de centaines d’engagés et de femmes que
Bertrand Ogeron
et ses successeurs font venir d’Europe. Les engagés,
en
échange
du voyage, devaient travailler 3 ans (on les appelait les
« 36 mois ») ; au bout de cette période ils étaient
libres.
Au début, les premiers colons recrutaient des gens de leur province
qu’ils
faisaient venir eux-mêmes. Cela devient un objet de commerce lucratif
pour les
capitaines marchands qui vendent leur cargaison humaine pour trois ans.
L’engagement
auprès des boucaniers est très éprouvant, les valets sont
traités sans
pitié. Les trois quarts meurent. Au terme des trois ans, ceux qui
restent en
vie rejoignent la flibuste car n’ayant pas gagné assez pour subsister
autrement. Rares sont ceux qui s’en sortent. « On [en] tirait les
mêmes
services qu’on aurait pu tirer des esclaves en vertu de bons contrats
que ces
malheureux avaient passé par devant notaires avant leur départ de
France ». Pierre François Xavier Charlevoix, Histoire de l’île
espagnole ou de Saint-Domingue, Paris, J. Guérin, 1730,
vol. 2,
p. 9.
Les
officiers et les fonctionnaires sont logés
en ville, ne vivent pas en famille et nombreux sont ceux qui décèdent
durant
leur séjour dans l’île. J’ai rencontré les nombreux décès de
chirurgiens,
arpenteurs, soldats, en explorant les registres paroissiaux de
Saint-Domingue.
Le
‘problème’ de la population féminine blanche :
elle constitue le quart des hommes libres mais seulement 10% de la
population
blanche totale en 1681, passant à 44% en 1700. Des contingents de
femmes sont
donc envoyés de la métropole ; peu arrivent en tant qu’engagées.
Le
problème de leur recrutement a été le sujet de maints courriers des
gouverneurs
des îles avec les autorités métropolitaines concernant la
« qualité »
des immigrées …
Recensement
de la population de Saint-Domingue en 1700 (document Philippe
Hrodëj)
CATÉGORIES |
Le Cap |
Port-de-Paix |
Léogane |
TOTAL |
Hommes |
449 |
133 |
554 |
1136 |
Femmes |
373 |
125 |
410 |
908 |
Garçons |
408 |
95 |
335 |
838 |
Filles |
342 |
103 |
307 |
752 |
Garçons à louage |
114 |
78 |
201 |
393 |
Filles à louage |
22 |
10 |
15 |
47 |
Engagés |
241 |
84 |
138 |
463 |
Hommes portant l’arme |
854 |
295 |
967 |
2116 |
La
colonisation de Saint Domingue
par Philippe
Hroděj,
« Les premiers colons de l’ancienne Haïti et leurs attaches en
métropole, à l’aube des premiers établissements (1650-1700) », Les
Cahiers de Framespa, 2012.
Ci-dessous :
une habitation à Saint Domingue :
Une bible : le livre de Moreau de Saint-Méry (1797), dans lequel l’auteur donne une description précise topographique, économique et humaine des différentes paroisses de Saint Domingue au XVIIIème.
Ci-dessous deux documents des Archives d’Aix en Provence (ANOM) : la carte des Gonaïves, avec les habitations Melin, Deronville, Marchand ... et la reproduction d'une carte manuscrite du nord de l’île de Saint Domingue (cartes du XVIIIème) :
Elles
permettent de mieux
suivre ce qui suit : les résumés
des descriptions par Moreau de Saint-Méry des Gonaïves, de Terrier
Rouge, du Gros
Morne et de Ouanaminthe où vécurent les DERONVILLE.
Paroisse des Gonaïves (Quartier de Saint-Marc, Partie Ouest de l’ile) pp 97-116 Tome II
Trouvé
sur internet : « La Brande,
quel nom n’émeut pas quiconque a vécu aux Gonaïves, et si cher à tous
autres
parce qu’elle est notre Pétionville. Située à quelques 6 lieues de la
ville et
bâtie sur une colline en pente. Partout où l’on est, la vue se repose
sur un
panorama grandiose qu’offrent les attrayantes perspectives du plus beau
paysage
qu’on puisse imaginer… » Mamou, juillet 1919.
A
propos de Gonaïves : « Ce
lieu qui porte un nom indien…avait …un nombre de boucaniers venus de la
Tortue
assez considérable pour qu’en 1663 les Espagnols de Santiago de Cuba
crussent utile
de l’attaquer ».
Le
20.7.1718 les
administrateurs, pour de nombreuses raisons, rattachèrent les Gonaïves
à la
Paroisse de l’Artibonite. En 1737, des espagnols essayèrent de s’y
établir mais
en furent chassés par M. Rossignol de la Chicotte, capitaine de
cavalerie à
l’Artibonite. A cette époque, on comptait déjà 27 indigoteries.
En
1744, on comptait 40 à 50
habitations assez considérables ; l’ouverture en 1750 de la route
du Cap à
Port-au-Prince passant par les Gonaïves amena l’essor de cette paroisse.
La
paroisse des Gonaïves est
constituée d’une plaine côtière ceinturée de montagnes, d’où descendent
des rivières :
au NNE la Brande ; à l’E la Grande Rivière ; au SE la Petite
Rivière ;
au S la rivière de la Croix. Toutes se réunissent au centre de la
paroisse dans
la rivière la Quinte qui se jette dans la mer. Ces rivières soumises au
climat
tropical sont très souvent à sec, ou sujettes à des crues parfois
dévastatrices.
La
barrière montagneuse au
nord et à l’est détermine le contraste entre : la partie nord de
Saint
Domingue, exposée aux vents alizés, et la partie ouest abritée de ces
vents et
soumise à un effet de foehn.
Dans
la plaine, on trouve vers
1780 3 importantes sucreries, 135 indigoteries et 15 plantations de
coton ;
le maïs y est de belle venue. Dans les gorges et plusieurs parties de
montagne,
on trouve 50 plantations de café. Les montagnes fournissent
l’acajou ; on y
trouve aussi le bois de charpente nécessaire pour la construction des
maisons,
étant donnée la fréquence des tremblements de terre. Les
« mornes » qui
bordent la baie sont d’une stérilité absolue, couverts de cactus.
L’élevage a
été réduit par les progrès de la culture ; on ne trouve plus
qu’une
seule « hatte » (élevage de bétail), vers 1780.
Les
vaisseaux de premier rang
peuvent mouiller dans la magnifique baie de Gonaïves. Des liaisons
régulières
permettent d’approvisionner le Cap en complément des transports
routiers.
Des
mangroves occupent la
majorité de la côte basse ; quelques salines ont été créées au
sud-ouest
du bourg.
Le
bourg lui-même, d’abord
installé au confluent de la Brande et de la Grande Rivière en 1738, fut
construit plus bas et plus près de la mer en 1751. En 1784, fut
construit un
canal amenant à la ville l’eau potable d’une source des habitations
BIGAULT et
MELIN (à l’entrée de l’habitation Soleil).
La
population des Gonaïves
était en 1730 de : 90 blancs, 14 affranchis, 294 esclaves ;
elle
atteint en 1783 les chiffres de : 940 blancs, 750 affranchis, 7500
esclaves.
La
milice, de 60 hommes en
1718, atteint en 1783 l’effectif de 196 blancs et 158 affranchis.
Paroisse
de Terrier Rouge
(quartier
du Fort-Dauphin, partie nord de l’ile) pp176-186 Tome I
Cette
paroisse, bordée au nord
par la mer, est « pour ainsi dire toute en plaine et ne renferme
qu’une
très petite portion montagneuse au sud ».
La sécheresse y sévit, néanmoins on y trouve des sucreries de
faible
rendement.
Au
centre de la paroisse, le
bourg lui-même ne comporte qu’une vingtaine de maisons éparses et
médiocres
pour les quelques petits détaillants.
C’est
au nord, dans le canton
de Jaquezy, que se concentrent les terres fertiles avec des sucreries.
Mais
c’est en bordure de mer, que se trouve le plus intéressant pour la
paroisse :
des mangroves fournissent le tan et des huitres. Trois embarcadères y
sont
possibles, mais le passage entre les nombreux ilots est délicat et les
passages
sont affermés. Des entrepôts sont construits aux embarcadères ;
les
chaloupes des navires d’Europe mouillés au Cap, y viennent chercher
l’approvisionnement nécessaire. Souvent aussi, c’est par la route que
se fait
le transfert vers le Cap.
C’est
sur cette côte que
Christophe Colomb aborda le jour de Noël 1492.
C’est
à Terrier Rouge que
furent naturalisés par les Jésuites les premiers caféiers de l’île,
dont les
graines servirent à toutes les autres plantations.
On
compte vers 1760 240
blancs, 160 affranchis et 5500 esclaves ; il y a une compagnie de
dragons
et une de fusiliers, composées de 90 blancs, et une troisième de 70
dragons-mulâtres et nègres libres.
Paroisse
d’Ouanaminthe
(quartier du Fort Dauphin, partie nord de Saint-Domingue) pp160-168
Tome I
Cette
paroisse porte un nom
indien, et faisait autrefois partie de l’immense quartier de Bayaha
dépendant
de Fort-Dauphin. Elle est limitée au sud par la frontière espagnole.
C’est une
paroisse de plaine, l’une des plus arrosées de la colonie. L’un des
cantons, les
hauts de Maribarou (encore un nom indien), très fertile, porte 11
sucreries avec 4 moulins à eau ; il se
situe entre la rivière de la petite
Artibonite et l’habitation ESCOT, qui borne au sud le bourg de
Ouanaminthe. Les
sols sont excellents le long de la Rivière Massacre qui forme la
frontière
espagnole. Les montagnes renferment des mines de fer et d’or et des
bois formés
de nombreuses essences, dont certaines très intéressantes.
Le
bourg doit toute son
existence aux échanges qui s’y peuvent faire avec les Espagnols.
D’autre part
l’air fort sain et l’approvisionnement en denrées alimentaires de
premier choix
y firent installer un hôpital militaire pour les scorbutiques et les
convalescents.
Dans
les années 1760, la
population est de 280 blancs, 270 affranchis, 7000 esclaves. 308 hommes
d’armes
en deux sections, l’une de blancs l’autre de gens de couleur.
Sur
les hauts de Maribarou, « le
7.6.1785 à 2 heures de l’après-midi à la suite d’un vent furieux suivi
de
pluie, vint une grêle dont on ramassa des grêlons aussi gros que le
poing, ceci
durant 28 minutes ».
« Le
2.10.1764 la foudre
tua M. de Belleville, procureur du Fort-Dauphin, M.Chaillou, ci-devant
notaire,
et un charpentier au bourg de Ouanaminthe. »
Paroisse
du Gros Morne (quartier du Port-de-Paix, partie nord de l’île)
pp707-710
Tome I
Tous
ses cantons sont
montagneux, sauf là où coulent les rivières qui se jettent dans la mer
vers
Port-de-Paix. C’est le long de la vallée « Trois Rivières »
que l’on
a construit « le grand chemin ». Cette rivière ne s’assèche
pas.
On
compte 90 indigoteries et
une trentaine de « caféteries ». Avant que la route ne soit
établie,
à cause des communications difficiles, il n’y avait que 43 habitants et
482
« nègres ». A la fin du siècle, la population était de 450
blancs, 280
affranchis, 4000 « nègres ». La milice compte 100 blancs et
90
affranchis.
La
situation jusqu’à 1789
L’arrivée d’une main-d’œuvre esclave
venue d’Afrique habituée au climat tropical fut justifiée tout d’abord
par la
disparition de la population indienne autochtone du fait des espagnols
(et avant
l’arrivée des français), ensuite par la pénurie d’engagés
« blancs » (moins
résistants au climat), et enfin par l’exemple des autres colonies que
le
système faisait prospérer. Les français ont suivi le mouvement avec
réticence car Louis XIII n’y était pas favorable. Les bateaux
négriers
amenaient des noirs, appelés suivant leur provenance : congo,
guinée….
La production de captifs était
une affaire quasi exclusive des Africains. L'écrivain et
journaliste
américain Daniel
Pratt Mannix
(1911-1997) estime que seuls 2 % des captifs de la traite
atlantique
furent enlevés par des négriers blancs. Dès 1448,
le roi du Portugal Henri
le Navigateur
avait
donné l'ordre de privilégier l'établissement de relations commerciales
avec les
Africains. Selon une enquête de M. Gillet établie en 1863
dans la région du Congo, seuls quarante esclaves
environ, sur
un total de 2571, étaient prisonniers de guerre ou bien avaient été
pris et
vendus par des peuples voisins. On comptait 1519 « esclaves de
naissances », 413 personnes avaient été vendues « par des
gens de
leur propre tribu sans avoir, selon (elles), commis aucun délit ».
Enfin
399 avaient été condamnées (pour infidélité, adultère, vol, crimes et
délits
divers, commis par eux ou par certains de leurs proches). En 1724,
dans la région du fleuve Sénégal, 50 captifs avaient été traités
pour :
C'est
ce que valaient les 50 captifs pour les négriers africains. Par contre,
le
négrier français convertissait le tout en monnaie fiduciaire française
et ces
50 captifs lui coûtaient 2 259 livres
tournois.
Ainsi chaque captif coûtait en moyenne
45 livres.
Après le transport dans des
conditions inhumaines l’esclave était acheté par un colon
(ou habitant) et estampé (marqué au fer rouge) aux initiales de
son
propriétaire. Les emplois étaient variés, je ne veux pas ici détailler
ce
chapitre ; pour résumer, il y avait les « nègres à
talent » qui
connaissaient un métier (forgeron, boulanger etc.), les nègres en
pleine forme
physique employés à la sucrerie, les domestiques qui travaillaient dans
l’habitation avec plusieurs grades (mais le plus souvent étaient
choisis des
créoles, nés à Saint Domingue, enfants
des noirs venus d’Afrique), les moins vigoureux étaient employés aux
jardins et
à des taches moins essentielles.
Etant donné le faible nombre de
femme blanche, les hommes blancs « se
mettaient en ménage » avec des
esclaves noires, et naissaient de nombreux enfants illégitimes esclaves,
mais créoles, et de couleur plus pâle que celle de leur mère.
Le métissage et donc la couleur de
peau qui marquent l’origine des
individus sont
présents jusque dans les registres paroissiaux, qui ne concernent que
les libres. On y trouve les termes : mestive, mulâtre, griffe,
quarteron,
tierceron, nègre, associés à l’adjectif libre. Le
registre des
libres n’est pas ouvert aux esclaves.
Le
racisme n’a pas de
limite !
De
nombreux noirs ont été affranchis par leurs
« maîtres » ;
noirs libres, ils ont pu épouser des métisses et leurs enfants sont les
« libres de couleurs ». L’arrière-grand-père d’Alexandre
Pouchkine,
le grand poète russe, se nomme Alexandre Hannibal, noir éthiopien,
ingénieur
militaire devenu général, anobli vers 1720 par le tsar Pierre le Grand,
il
épousa une jeune fille de la noblesse russe.
Plus
nombreux sont les libres de couleur enfants d’un blanc et d’une noire
libre ou affranchie, ou d’un blanc et d’une quarteronne libre ;
certains
ont eu un destin remarquable : Alexandre Dumas, le Chevalier de
Saint
George.
Néanmoins,
sous l'Ancien
Régime,
les gens de couleur libres ont été rigoureusement limités
dans leurs libertés ; ils ne possédaient pas les mêmes droits
que
les Français blancs. Pourtant, la plupart des gens de couleur
libres ont
soutenu l'esclavage, au moins jusqu'à la période de la Révolution
Française.
La
reconnaissance de l'égalité des droits pour les gens de couleur libres
fut l'un
des premiers "problèmes" qu'eut à affronter la Révolution Française.
Dans
le royaume de France, l'édit
du 3 juillet 1315
de Louis
X le Hutin
proclama que le sol de France affranchissait quiconque
y posait le pied. L'application de l'ordonnance royale demeura
cependant
strictement circonscrite au territoire européen, ne remettant à aucun
moment en
cause la participation active de Français au commerce
triangulaire
et à
la mise en place d'une économie esclavagiste dans ses colonies
antillaises. En
1685, à l'initiative du ministre de la marine Colbert,
une ordonnance, connue par
la suite sous le nom de Code
noir,
est prise pour leur donner
un statut juridique. Les parlements refuseront de l'enregistrer, comme
contraire aux principes du droit français. Pourtant cette
ordonnance a
plusieurs mérites : elle reconnaît aux noirs une personnalité
juridique,
oblige à les baptiser, à les instruire, leur permet de se marier, donc
de
contracter, de se constituer un pécule et de racheter leur liberté,
elle
interdit aux maîtres de les maltraiter et de les faire travailler les
dimanche
et jours de fêtes, leur donne le droit de se plaindre en justice contre
leurs maîtres,
leur permet d'agir et de témoigner en justice, interdit de séparer les
familles
en vendant séparément un de leurs membres. Elle donne aux maîtres un
droit de
correction qui nous paraît très dur, mais qui existait aussi pour les
soldats
et les domestiques. Elle interdit aux maîtres les relations sexuelles
avec les
esclaves, sauf dans le cadre du mariage qui n'est pas interdit entre
personne
libre et esclave. L'esclavage reste strictement limité aux îles
françaises
d'Amérique, c'est-à-dire aux Antilles
françaises,
il
reste proscrit ailleurs, en particulier en Nouvelle-France
et en
Louisiane.
Il
sera appliqué aux Antilles en 1687, puis étendu en Guyane
en
1704, à la
Réunion
en 1723, et enfin en
Louisiane en 1724. Néanmoins, beaucoup de maîtres d'esclaves ne le
respectent
pas.
Après
1789
L’idéologie
ségrégationniste s’imposa à Saint-Domingue par
la législation locale dans les années 1760-70. Les colons jugés
mésalliés avec
des femmes de couleur furent rejetés dans la catégorie des
sang-mêlés :
l’alliance était notée d’infamie. Mais, parvenus à ce point de
discrimination,
de nombreux colons souvent nobles, dont la femme et les enfants étaient
de
couleur, préférèrent quitter la colonie et se réfugier dans le royaume
pour
échapper à la ségrégation. Or, en France, où le préjugé de couleur
était moins
prégnant, ces familles de riches colons métissés furent favorablement
accueillies
et leurs enfants se marièrent noblement ou richement, ou les deux à la
fois.
Cependant, cette fuite de colons discriminés est révélatrice d’un état
de
division avancé que connaissait la classe des maîtres à Saint-Domingue.
A
Saint-Domingue, dès le mois de novembre
1789, des assemblées coloniales furent créées dans les trois
provinces de
la colonie. Les assemblées primaires furent réservées aux blancs et les
libres
de couleur en furent exclus, parfois avec violence. Dans la province du
Sud, le
juge Ferrand de Beaudière, qui prit la défense des libres de couleur
réclamant
leur participation aux assemblées coloniales, fut assassiné par le chef
du
parti ségrégationniste, Valentin de Cullion, le 19 novembre 1789. Cet
assassinat pour l’exemple devait convaincre les blancs de renoncer à
aider les
libres de couleur.
Vincent
Ogé, membre de la Société des Citoyens de couleur de Paris, décida
de rentrer à Saint-Domingue pour faire appliquer le décret du 8 mars
1790 dans
l’interprétation favorable à l’égalité des droits. Il réussit à quitter
la
France via Londres, malgré le contrôle des Chambres de Commerce sur les
allées
et venues des gens de couleur, et atteignit Saint-Domingue en octobre
1790.
Avec ses amis, il réclama l’application du décret du 8 mars au
gouverneur
Peynier qui ne l’interprétait pas comme lui et niait les droits des
libres de
couleur que l'on désignait dans la langue du préjugé de couleur par les
termes
insultants de mulâtres ou sang-mêlé. L’Assemblée coloniale du Cap
répondit à la
demande d’Ogé par la répression. Ogé et ses amis, qui avaient pris les
armes
pour se défendre, parvinrent à se réfugier dans la partie espagnole de
l’île,
mais furent peu après livrés par les autorités espagnoles à leurs
ennemis.
Condamné avec son ami Chavannes par l’Assemblée du Cap, ils furent
rompus vifs
et leurs têtes exposées, le 25 février 1791.
Je
ne veux pas ici reprendre l’histoire de Haïti, ce que je peux dire
c’est qu’après
l’échec de Toussaint Louverture, la lutte pour l’indépendance continua.
Pétion,
puis Dessalines forcèrent les français à abandonner l’île.
Après
le départ des Français, Dessalines provoqua aussitôt le massacre
de la population blanche restante et des métis à l'exception des prêtres,
médecins,
techniciens. Il redonna à Saint-Domingue son nom indien d'Haïti (Ayiti)
et
proclama la République le 1er
janvier 1804
aux Gonaïves, première république noire
libre.
DERONVILLE/DEROUVILLE :
un problème de couleur de peau ?
Cette
histoire douloureuse nous fait penser que le départ des DEROUVILLE a dû
concerner ceux d’entre eux qui prenaient le parti des non
abolitionnistes,
alors qu’une autre partie est restée, puisque Haïti porte aujourd’hui
le
souvenir de ce patronyme, à Gonaïves. On pourrait alors justifier une
distinction
entre les DERONVILLE abolitionnistes et les DEROUVILLE non
abolitionnistes, les
premiers peut-être plus métissés que les autres. Le lieu DERONVILLE à
Haïti est
situé à Gonaïves (voir carte ci-dessus), lieu emblématique de la
déclaration
d’indépendance, et à l’endroit même où est mentionné ce nom sur le plan
de
Gonaïves.
SOURCES
- Les illustrations proviennent d'Internet.
- AD de la Gironde à Bordeaux :
passeports de Louis Deloustal et
d’Anne Constans sa mère, Sosa 24 et 49
- Consulat d’Espagne à la Havane (Cuba) : délivrance le 16.12.1676 de l’ acte de
baptême de Jules et de la copie d’acte de mariage de ses parents à la cathédrale de Santiago de Cuba, à Mondette
DELOUSTAL, petite fille de Jules Deloustal (Sosa 12)
-
Archives Nationales
d’Outre-Mer à Aix-en-Provence (ANOM) : registres paroissiaux,
actes
notariés et cartes
-
Moreau de Saint-Méry :
Description
topographique, physique, civile,
politique et historique de la partie française de l’isle de Saint-Domingue ;
Philadelphie,
Paris, Hambourg, 1797-1798, avec carte
de Saint Domingue et plans (de Terrier Rouge, de Gonaïves avec les
concessions
MELIN, DERONVILLE, MARCHAND, TROPEE).
-
Domingino (sur internet, site du Dr Oliver Gliech de
Berlin) donnant les résultats de ses recherches sur Saint
Domingue (certaines parties payantes).
-
Houdaille
Jacques. Le métissage dans les anciennes colonies françaises. In : Population,
36ᵉ année, n°2, 1981, pp. 267-286 (sur internet).
-
Florence Gauthier : De
la
Révolution de Saint-Domingue à l’Indépendance d’Haïti. Comment sortir
de
l’esclavage ? 1789-1804 ;
2005 Université Paris 7(sur
internet).
-
Cartes topographiques actuelles
de Haïti (sur Internet)
-
WIKIPEDIA : les colons
des Antilles
-
Geneanet : arbre de
Bissonnier
-
Philippe
Hroděj,
« Les premiers colons de l’ancienne Haïti et
leurs attaches en métropole, à l’aube des premiers établissements
(1650-1700) », Les Cahiers de Framespa [En ligne],
9 | 2012, mis en ligne le 08 mars 2012. URL :
https://journals.openedition.org/framespa/1050
-
Documents DERONVILLE trouvés
grâce à la bibliographie de Geneanet :
« La
Comédie : 10 ème année du journal : p.6/8 le 17.11.1872
« l’actrice
Mme Deronville »
« Gazette
de Saint-Domingue : politique civile économique et littéraire.
Affiches,
annonces et avis divers », le 5.11.1791 : les Nègres épaves,
Charles
et l’Espérance, nègres Mozambique, estampés illisiblement, se disant
appartenir
à M. Deronville de Gonaïves
« Le
voleur », 15.8.1833 Théâtre de la gaieté : Le
fils naturel ou le Bois de Romainville, mélodrame en 3 actes de
MM. Lesguillon et Leroy ; le héros est Eugène Derouville
« L’Echo
de la Bretagne « 2.8.1896, feuilleton de Jeanne Sandol : Le puits qui parle, le héros est Pierre
Derouville qui part pour le Tonkin
« Le
Journal »15.5.1900 spectacle aux Ambassadeurs à Paris, Deronville
« Journal
des avoués, ou recueil de procédure civile, commerciale et
administrative » vol 11857 p.274/612 : Deronville