Le site de généalogie de Catherine et Michel Meste




Les ancêtres alsaciens de Catherine (suite) : les HERTZOG à Eguisheim



(Sosa 1 : Catherine Meste-Nerzic)


Dans un précédent article (Mes ancêtres alsaciens), j’ai déjà évoqué la rencontre de mes ancêtres alsaciens Jean-Jacques Hertzog et Anne-Marie Althuser, qui a eu lieu durant la Révolution.

Depuis la fin du XVIIème, la Province d’Alsace appartenait au Royaume de France (excepté Mulhouse, république protestante alliée à la Confédération suisse). A la Révolution, à côté des deux départements : Haut-Rhin et Bas-Rhin, est créé un autre département (éphémère), celui du Mont-Terrible, à partir de l’évêché de Bâle et de la principauté de Montbéliard : sous le Consulat en 1800, il sera incorporé au département du Haut-Rhin.

C’est à Laufen dans ce territoire du Mont-Terrible, que naît en 1801 François HERTZOG premier enfant de Jean-Jacques et Anne-Marie. Leur deuxième enfant, ma Sosa Marie Catherine HERTZOG, naît en 1802 à Sallanches (Haute-Savoie aujourd’hui, territoire également annexé temporairement à la Révolution).

Lors de ma recherche des ancêtres de Marie Catherine Hertzog Sosa 29 je m’étais surtout attachée à la découverte des parents de sa mère, Anne Marie Althuser. Les résultats de cette recherche éclipsèrent alors la lignée Hertzog !

En effet l’acte de décès d’Anne Marie ALTHUSER le 12.2.1843 à Neuf-Brisach, donne la date de sa naissance à Artzenheim le 1.12.1767 ; elle est la fille de Ferdinand Althuser et de Anne Marie MÜLLER (Sosa 118 et 119). A cette étape entrèrent en jeu les généalogistes de Geneanet (Pierre Marck et Anne Ludwig) qui ont trouvé les ancêtres de Anne Marie Müller :  elle est la descendante de Marie Jacobée von KAGENECK, jeune fille noble de Colmar dont la conduite (au moment de la Guerre de Trente ans) a amené la communauté à la marier à un militaire, non noble, originaire de Champagne : Jean Utard, ou Houdard (l’orthographe varie, nous sommes en 1640). Conclusion : par Marie Jacobée, je descends de Charlemagne, Guillaume le Conquérant, Aliénor d’Aquitaine….

J’avais alors négligé l’ascendance de Jean-Jacques Hertzog Sosa 58 ; son acte de décès le 26.7.1815 à l’hôpital militaire de Neuf-Brisach mentionne son âge et son lieu de naissance. On y trouve les signatures de sa fille, de sa femme et de son gendre. Grâce à l’Association « Le fil d’Ariane », j’ai pu retrouver les parents de Jean-Jacques : Jacques Hertzog et Anne Marie Kolb, ainsi que toute la lignée de ces viticulteurs, souvent édiles de leur ville, pour arriver à Mathias au XVIIème siècle, avec cette fameuse Guerre de Trente Ans qui a réuni l’Alsace à la France !


Les HertzogLe témoignage de Mathias Hertzog

Ce sont encore une fois les généalogistes de Geneanet qui m’ont permis de prendre connaissance d’épisodes dramatiques de la vie de mes ancêtres à partir en particulier d’un témoignage écrit de Mathias Hertzog Sosa 928 (1617-1676) sur cette même guerre. Je reprends la présentation donnée dans une revue alsacienne de généalogie :

« Les quelques pages autobiographiques de Mathias Herzog constituent un intéressant témoignage pour des années terribles vécues en Alsace pendant la guerre dite de Trente ans. On peut supposer que ces pages ont été rédigées après 1635. D’ailleurs, Herzog s’est-il arrêté à l’an 1635 ou bien une éventuelle suite a-t-elle été perdue ? Une copie a été conservée dans la famille, datant vraisemblablement de la fin du XVIIIe, ou du début du XIXe siècle ; l’original a disparu. Vers 1894, Ignace Herzog, lointain descendant de Mathias et viticulteur à Eguisheim, a confié la copie à l’instituteur Karl Sebastian Gutmann qui en a réalisé une transcription dactylographiée avec quelques annotations. Le texte, dans une version que l’on peut considérer comme originelle compte tenu des tournures de la langue allemande, a été publié par A.M.P. Ingold dans Miscellanea alsatica, troisième série (Henri Huffel, Colmar et A. Picard et fils, Paris, 1897). Auguste Scherlen, archiviste de la ville de Colmar en a publié une version en allemand du XXe siècle dans « Egisheim, Dorf und Stadt » pour le compte de la commune d’Eguisheim (Éditions Alsatia à Colmar, 1929).

Le texte commence ainsi :

1617 : Je suis né le 2 février 1617, ici, à Eguisheim. Mes parents étaient Georges Herzog et Marie Haberess et j’avais huit frères et sœurs. La peur et la misère ont marqué mes jeunes années, ainsi qu’on va le voir dans les pages qui suivent.

1622 : J’allais sur mes 5 ans, quand, le 21 janvier, Mansfeld envahit la région ; il fit beaucoup de dégâts partout. À ce moment-là on a coupé les noyers du canton Buhl de manière que l’on puisse voir le château de Herrlisheim, en contre-bas. On a mis les noyers coupés sur le chemin du Bihl ; le chemin du Bachhöffelen et la route de Colmar ont été couverts avec des sapins, tout ceci pour faire barrage et empêcher les cavaliers d’accéder à notre petite ville. Puis nous avons connu l’inflation ; l’écu d’Empire (Reichsthaler) valait jusqu’alors un florin et demi (Gulden), il est passé à cinq florins. » […]

….

1635 : À l’époque de Carnaval, les Lorrains sont revenus par Breisach et ont chassé les Français et ont cassé tous les panneaux que les Français avaient mis en place pour les armées du roi. […] Mais en ce même printemps, le froid a entièrement gelé les vignes, sur les collines comme en contre-bas.

 Et, le mercredi après la Pentecôte de la même année, les Lorrains sont réapparus dans un grand tumulte ; ils avaient repassé par le pont de Breisach pour ensuite monter leur camp sur les bords de l’Ill près de Sainte-Croix. Ensuite on les revit sur nos collines ; ils ont tout pillé, ils ont dépouillé l’église de tous ses ornements, tué des gens, même les petits enfants innocents, fendu les crânes des uns, pendu d’autres ; ils ont aussi entièrement déshabillé des personnes, les ont enduites de miel pour les rouler ensuite dans des plumes et les promener dans la ville sous les railleries de tous. À d’autres on a lié les mains dans le dos, puis enfoncé un bout de bois ou une poignée de paille dans la bouche puis versé du purin ou de l’urine humaine ou animale ; ensuite les soldats leur marchaient sur le ventre pour faire rejaillir le liquide, et ils recommençaient, jusqu’à ce qu’on leur promette de l’argent et si on n’avait pas d’argent, ils vous laissaient là, par terre. À mon père, ils l’ont fait trois fois, et deux fois il leur a donné de l’argent, mais à la troisième il n’avait plus rien à leur donner, alors ils l’ont laissé au sol.

Le texte se termine ainsi :

En cette année 1635, mon père est mort, ainsi que ma mère. Mes frères et sœurs sont tous tombés malade, et à Carnaval tous étaient morts hormis un de mes frères et une sœur […].

La paix revenue, l’Alsace devenue française, Mathias se marie deux fois ; sa première épouse, Anne Spony, est la mère de Hans Dominique Sosa 464 mon ancêtre né vers 1656. Sa deuxième épouse Marie Wegbecher donne le jour en 1662 à Jacques Hertzog qui sera arpenteur du Roi.

L’arpenteur du Roi

C’est encore une fois grâce aux recherches d’un membre de geneanet, cette fois-ci Bernard Weiss, que je prends connaissance de « l’étrange destinée de Jacques Hertzog, arpenteur du roi ».

 Jacques Hertzog, demi- frère de mon ancêtre Hans Dominique Sosa 464 (tous deux fils de Mathias Sosa 928) était arpenteur du baillage de Heiteren, et prévôt de Balgau.

            Il se serait enfui de nuit le 29.10.1708 avec tous ses effets mobiliaires ( ?), au détriment de tous ses créanciers. Il semble qu’ayant perçu les redevances en tant que prévôt, il ne les ait pas reversées à la seigneurie…

            On le retrouve en 1709 ; depuis Goselmingen près de Sarrebourg (en Moselle germanique) où il est devenu Schulmeister (maître d’école), il écrit au prévôt d’une ville proche de Balgau, qui lui transmet l’offre des autorités : qu’il revienne, il reprendra son métier d’arpenteur, aura un logement gratuit, et sera « comantierer » (?) de la seigneurie.

            On trouve son décès en 1709 à Guemar, un autre baillage du même comté : il a donc été réintégré dans son pays d’origine.

            Des recherches, dans les archives de l’époque, montrent que par sa fuite   Jacques ne veut pas échapper à des dettes dont il serait coupable, mais à une situation intenable. Prévôt, il devait reverser au Roi les sommes qu’il percevait, mais fonctionnaire du Roi en contrepartie il devait recevoir des émoluments qui ne lui étaient pas versés. D’où la conduite des autorités qui le rappellent : après éclaircissement du » malentendu ».

 

EguisheimAinsi l’étude de mes ancêtres Hertzog d’Eguisheim est tout aussi instructive, sur le plan historique, que toutes celles que j’ai pu mener à la recherche de mes ancêtres. Ce furent en particulier :

-à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine) : Guillaume Boulain, corsaire en 1488 de François II dernier duc de Bretagne ; Guillaume Lebreton Bastille et la découverte du Canada en 1535 ; Bernard Boulain avec la République Malouine en 1590 pendant les guerres de la Ligue ; Pierre Blanchard des Rabines, premier Maître de Poste de Saint-Malo en 1730

- à Bannalec (Finistère): Vincent Laënnec à la bataille de Quimerc’h en 1597, là aussi durant les guerres de la Ligue

-à Pontorson (Manche) : Antoine Beauchef, ordonnance en 1611 au château de Pontorson du duc de Montgomerry durant les guerres de la Ligue encore

-à Villedieu-les-Poêles (Manche) : les Dolley, poêliers et dinandiers (leur statut particulier fut créé au XVème siècle dans la ville des Chevaliers de Malte) dont une descendante épousera à Saint -Malo en 1748 un écuyer employé des fermes du Roi

-à Chalabre (Aude) : Louis Deloustal, parti d’une petite ville vers Cuba où il épouse   en 1840 la fille d’anciens « habitants » de Saint Domingue exilés au moment de la Révolution haïtienne, traversant à nouveau l’Atlantique et rejoignant la Méditerranée pour fonder une usine de savon à Barcelone, donnant la vie à un nouvel aventurier :

- Jules Deloustal né à Cuba, élevé à Barcelone, marié à Marseille en 1870, partant en 1880 pour la Tunisie juste avant la création du Protectorat, et amenant toute sa nichée au Tonkin au moment de la création du Protectorat au Tonkin

-à Hanoï : Raymond Deloustal, digne successeur des précédents, participe à la création du Quốc ngữ, l'écriture latinisée de l’annamite utilisée encore de nos jours

 

Mes ancêtres alsaciens, comme tous ceux que je viens d’évoquer, m’ont fait entrer dans l’intimité de l’histoire de France, à partir de la vie même de ses habitants.

 



 


Auteur : Catherine Meste-Nerzic.      Pages réalisées avec Kompozer.